Par Viviane Nkurunziza – 30 octobre 2013
Le 11 octobre 2013 on annonçait le prix Nobel de la paix
2013. Parmi les candidats en course, la jeune Malala, 16 ans et plus jeune
nominée de tous les temps pour un prix Nobel, pour son combat pour l’éducation
des filles au Pakistan, qui l’aura menée jusqu’à risquer sa vie au service des
droits humains.
En 1929 naissait en Allemagne Anne Frank. Elle mourut à
16 ans quelques jours après la mort de sa sœur Margot, du typhus dans le camp
de Bergen-Belsen à quelques jours de la libération. Elle aurait eu 84 ans
aujourd’hui, mais toutefois, de l’annexe secrète où elle resta cachée pendant
deux ans avec sa famille et une autre famille juive, sa mémoire demeure
toujours grâce à son journal de la vie. Un carnet que lui avait offert son père
lors de ses 13 ans et qu’elle avait décidée d’en faire, dès lors, un journal
intime.
Je ne vous cache pas la joie et la fierté que j’ai
éprouvée à l’annonce des candidats pour le prix Nobel de la paix 2013 et la
déception qui s’en est suivie quelques jours après quand le nom du lauréat a
enfin été dévoilé. J’aurais tant voulu que le courage de Malala, sa rage et son
combat soient reconnus de tous. J’aurais tant voulu qu’elle remporte le prix le
plus prestigieux et le plus noble qu’on puisse avoir.
Tout commence en 2009 lorsque cette adolescente alors âgée
de 11 ans crée avec le soutien de son père un blog, Le journal d’une écolière pakistanaise, dans lequel elle raconte
son quotidien fait de peur des talibans qui tuent sur leur passage et
incendient des écoles pour filles. Trois ans plus tard, c’est de deux balles à
la tête qu’elle est victime alors qu’elle rentre de l’école. Balles destinées à
la faire taire à jamais. Aujourd’hui, véritable miraculée, c’est encore avec
plus de force qu’elle continue son combat pour l’éducation des filles au
Pakistan forçant l’admiration du monde entier.
Son parcours suscite en moi une grande émotion quand je
me rappelle qu’à son âge je ne rêvais que de rencontrer le salaud qui avait osé
créer cette institution qu’est l’école. Je me rappelle entres autres du jour où
des grévistes sont venus à mon école pour nous empêcher d’étudier. Du haut de
ma classe de seconde qui se trouvait à l’étage, on pouvait les voir créer le
chaos dans les autres écoles voisines et on n’attendait qu’une chose, qu’ils
arrivent enfin chez nous pour qu’on puisse rentrer à notre tour. On aurait dit des
sauveurs quand ils ont farouchement grimpé sur la clôture de l’école. Quand je
pense alors à Malala, je ne peux qu’être admirative devant une telle grandeur.
Je n’ai jamais lu Le
Journal d’Anne Frank mais j’ai beaucoup entendu parler d’elle dans la
presse et par des amis, j’ai fait des recherches sur elle et j’ai vu le téléfilm
(2008) adapté de son livre. C’est l’histoire d’une adolescente juive qui rêvait
d’être journaliste et romancière célèbre quand elle serait grande et qui rêvait
des paillettes d’Hollywood. Du haut de ses 13 ans, de l’annexe, elle a su
émouvoir le monde entier par ses écrits qui témoignent de ce que pouvait être
la vie d’un juif pendant la deuxième guerre mondiale, de ce que pouvait être la
vie en cavale et de ce que peut être la vie d’une adolescente faite de rêves et
d’ambition, d’incertitude, de peur mais également de nouvelles découvertes agréables
comme l’amour, mais qui n’a que, finalement, pour seuls moments d’évasion les
pages de son journal intime et les moments qu’elle y passe avec sa seule vraie
amie, Kitty, une amie imaginaire, à qui elle se confie sur tout dans ses
lettres.
Son envie de publier ses écrits une fois que la guerre serait
finie pour raconter l’horreur de cette guerre sans merci en mémoire des
victimes, la poussa à en faire un combat quotidien. Pour cela elle supprima certains
passages de son journal qu’elle jugeait sans importance, en en améliorant
d’autres pour se rapprocher le plus possible de la réalité.
Elle n’a pas conquis Hollywood, mais la planète entière.
Elle aura aimée, haïe, espérée, pleurée, doutée, rit, souffert. Elle se sera
autorisée à vivre malgré les péripéties avec courage pour rendre les jours dans
la cachette vivables et soutenables. Elle aura écrit pour exister et sans le
savoir, touchée le cœur des millions de gens par son histoire bouleversante. De
l’anonyme bloggeuse qui lui rend hommage à partir du Burundi au grandissime
Nelson Mandela qui confia au monde en 1994 lors d’un discours, combien Le Journal d’Anne Frank lui fut d’une
grande aide lors de son enfermement dans la prison de Robben Island.
Une belle leçon de courage dans les yeux de deux jeunes féministes
engagées qui n’ont pas hésité à remettre en question l’être humain pour en ressortir
ce qu’il peut y avoir de bien en lui. Deux vies séparées par une époque mais
rapprochées par leur amour de la vie et leurs combats pour la liberté et le
droit à l’expression. Agées de 12 et de 13 ans quand leurs vies ont basculées,
précoces et incomprises sans doute, elles auront fait de leurs vies une
conviction.
Cet article est un hommage à elles en guise de
reconnaissance pour avoir fait leur part dans la construction d’un monde
meilleur en démontrant que le courage ne connait pas d’âge.
Leur histoire nous rappelle combien nos différences et
nos croyances au lieu de nous servir d’atouts quant au développement de la race
humaine, nous rendent aveugles et impitoyables, indifférents et sots face à la
plus commune des vertus que l’humain ait jamais eues, l’humanité.
Heureusement, des gens comme le père de Malala qui n’a cessé
d’encourager sa fille ainsi que les Gies aidés par deux complices, tous non
juifs, qui furent le seul lien entre l’extérieur et l’annexe au péril de leur
vie, sont là pour nous rappeler que le monde, quoi qu’il s’y passe est aussi rempli
de ces autres héros d’un autre genre que l’histoire ne retient pas forcément
mais sans lesquels la vie n’en serait pas vraiment une s’ils n’avaient pas
existé.
Et vous, quelles sont les femmes aux parcours
exceptionnels qui vous inspirent ?
ppapillonvert@gmail.com
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